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Rock'N'Trail - 24h duo🥈

Récit de cette course particulière qu'a été la Rock'N'Trail en duo avec l'ami Rémy. Le format de la course en fait sa particularité, c'est relativement simple. Inspiré des fameuses "Backyard", l'idée est de tourner en rond, avec un départ toutes les heures. À la différence cette fois que ça s'arrête à 24h, et que le parcours fait 7.4km et 162 de D+, et accessoirement, c'est dans une carrière de pierres.


Comment on en est arrivé là ?

Oui la question est légitime. C'est quand même pas les trails qui manquent en France, et on a terminé à Muneville-Le-Bingard, en Normandie non loin de Saint-Lô et Caen. Qui plus est dans une carrière dans le trou du cul de la Normandie qui est déjà presque le trou du cul du monde juste avant la Creuse. La réponse est simple, je tombe sur la course sans même regarder où c'est parce que je trouve le logo joli, je l'envoie à Rémy en lui disant qu'elle avait l'air marrante cette course. Ça a suffit pour lui donner envie de s'inscrire sur le format duo avec moi. En 10 minutes on est inscrit sur la course, sous le nom d'équipe Runbras.


Je suis obligé de faire une aparté sur le Runbras, car personne ne sait, et il est temps un petit peu de révéler au monde le sens de ce mot. Il existe aujourd'hui une discipline Olympique qui est la marche athlétique. En fait selon nous (enfin surtout moi et mes principes), c'est simplement de la course à pied avec des règles supplémentaires histoire de dire non, non ce n'est pas de la course. En l'occurrence, il suffit de courir, en ayant toujours au moins 1 pied en contact avec le sol, et comme par magie, ça devient de la marche athlétique. Alors les mecs nous font des 20km en 1h16, donc 15.7km/h, 3:46min/km mais ils marchent. Moi j'pense qu'il faut qu'on arrête un peu de nous prendre pour des cons.

Mais bon bref, du coup nous aussi on est capable de mettre des règles pour inventer des sports, et c'est comme ça que le Runbras est né. C'est simplement courir, mais en gardant les bras le long du corps. Les bras doivent impérativement toucher le corps, des épaules jusqu'à la hanche pour que ce soit validé. En gros, tu cours, tu fais coucou au publique, c'est simple, tu sors. Tu es éliminé. Vous connaissez donc le Runbras, on vise Paris 2024 n'hésitez pas à promouvoir la discipline, il y a encore tous le records à prendre, saisissez l'occasion.


L'équipe Runbras est donc inscrite, et juste après la question importante tout de même est vite arrivée: comment on y va ? La réponse a été trouvée assez rapidement par Rémy: C'est une question pour Guillaume du futur. J'étais convaincu, et ça m'a suffit.

Pour résumer, Je dois traverser la moitié de la France et Rémy toute l'Espagne et la France, pour aller à Muneville-Le-Bingard dans une carrière pour tourner en rond pendant 24h. Ça ne peut que bien se passer.

Les jours avant la course

Bon comme d'habitude j'ai hâte d'y être. Je suis souvent dans le doute suite aux différentes blessures que j'ai, notamment mon problème de cheville, mais je ne vais pas trop revenir dessus. J'ai mal avant d'y aller, j'aurai mal un peu pendant et beaucoup après, mais j'étai à un niveau de douleur qui me laissera prendre le départ, c'est tout ce qu'on retiendra sur le coup.

J'ai hâte d'y être parce-que c'est quelque chose de nouveau malgré tout. C'est la première fois que je fais une course réellement à deux. Et ayant fait une Backyard quelques mois auparavant j'avais vraiment envie de comparer. Dans mon esprit ça allait forcément être beaucoup plus difficile, parce que en autant de temps qu'un tour de Backyard (1h), 0.7km et 162 de D+ en plus, ça ne laisse pas énormément de temps pour marcher. Donc j'ai vraiment hâte de me faire une idée.

Également, il y l'envie d'établir une stratégie. Comment faire à deux pour gérer au mieux les 24h ? Un tour chacun ? 2/2 ? ou même 12/12 ? C'est difficile à dire avant même de commencer la coure, donc dans un premier temps on se dit qu'un fera un tour chacun, et ensuite on avisera en fonction de la forme.

Je suis aussi hypé par les courses dans la course. En lisant le programme, je vois qu'il y a ce qu'ils appellent le "Burning Lap". Le principe est assez simple, il faut aller le plus vite possible au 8ième tour, au risque de se fatiguer pour la suite des événements pour potentiellement rien car seul le 1er remporte la mise, à savoir sa taille en bouteille de bières et une coupe en sorte de flamme bien stylée. La victoire de la course est basé sur le même principe, mais au tour 24 (le dernier tour quoi) le classement est fait sur les équipes restantes qui font la meilleure performance (le temps des tours d'avant ne compte pas).

Mon entrainement ?

C'est en dent de scie... J'y vais à peu près entrainé, mais je sors d'une fracture, j'ai des problèmes à la cheville ça fait depuis la Backyard que je n'arrive pas à m'entrainer sur le long terme correctement j'ai toujours une couille à un moment ou un autre. C'est pas optimal, mais ça fera l'affaire pour cette course, j'y vais plus pour l'expérience que la performance.


Le jour de la course

Après 3h30 de voiture, on finit par arrive à Muneville-le-Binguard. Je confirme, c'est au milieu de nulle part, y'a même pas de réseau, pas vraiment de quoi admirer le paysage de Normandie que je vois déjà assez rarement, mais finalement cette carrière a un charme et elle est en elle même suffisante pour créer une ambiance unique.

La fameuse carrière de pierres

Première chose que je fais en arrivant donc c'est d'aller voir le terrain de jeu, j'analyse, je réfléchis à chaque passage que je vois, je mets en place mes propres petites stratégies. Non c'est pas vrai en fait j'ai juste regardé la carrière j'ai pas tout compris par où les coureurs allaient passer, mais j'ai trouvé ça vachement sympa et j'avais qu'une envie c'était de commencer ! Je suis sûr que rien que de voir la photo, vous avez envie d'essayer. Honnêtement je m'attendais pas à autant de verdure dans une carrière, c'est pas du tout austère y'a un vrai paysage ! C'est assez unique.

On arrive ensuite dans la zone de course, le départ et l'arrivée, là où tout se passe quoi. On est accueillit dignement, un maxi BBQ est en place avec des saucisses, des frites bien grasses qui vont bien avec. Un stand de crêpes aussi parce que pourquoi pas. Une buvette et bien évidemment une zone réservée aux coureurs à l'intérieur avec un ravitaillement complet, ça c'est illimités pour nous, les athlètes (vous pouvez rigoler oui). Alors le petit truc drôle c'est que mon père qui nous a conduit ici et qui est là pour nous encourager le long de la course n'est pas autorisé à l'intérieur et ça, on ne savait pas. Pour les autres, des chaises étaient à disposition, des toilettes, des douches, des kinés et masseurs pour nous revigorer pendant la nuit, bref on est pas trop mal !

On est arrivé 2h avant le départ et donc on a bien eu le temps de prendre nos marques et la question que le monde entier se pose: est-ce que on a tout de suite tapé dans le BBQ ? Oui, évidemment et pas qu'une fois.

Le départ va bientôt commencer et j'ai vraiment hâte de juger ce 1er tour. Je le sais déjà il me suffira d'un seul tour pour savoir si on aura les capacités de finir cette Rock'N'Trail ou pas. Il me suffira de ça pour le comparer et m'imaginer le répéter 12 fois. Honnêtement je me doute que ce sera faisable, mais quand même un doute subsiste, l'année dernière il y a eu beaucoup d'abandon et le gagnant du solo 24h a fait 15 tours, tout le monde a abandonné avant, c'est que ça doit quand même être difficile.

Départ - 1er tour

Bon au final on a parlé stratégie à peu près 45 secondes avec Rémy. Quit à pas être opti, histoire de quand même être un peu ensemble on s'est dit que on allait découvrir le 1er tour ensemble. On est resté sur la stratégie 1 tour chacun et à priori je n'ai pas eu d'autre choix que d'être la personne qui participe au "Burning lap", donc comme aucune discussion n'a été possible, ça a été relativement vite. L'idée était donc qu'après le 1er tour j'enchaine le 2ieme tour pour. Fort de ma grande expérience sur la Backyard, je sais que le but n'est pas d'arriver le 1er, mais d'arrivé le plus frais. Alors pour cette course, à chaque tour (ou presque) là où c'est un peu original c'est que la vrai perf va être de jouer la dernière place. Sachant que la stratégie est 1 tour chacun, on a forcément minimum une heure pour se reposer alors autant prendre le maximum de temps.

On arrive à la fin du 1er tour, aucun problème. On s'est trouvé avec Rémy un groupe, notamment des gens qui avaient déjà fait la première édition l'année dernière. On forme le groupe des derniers, comme prévu. Dans l'idée d'économiser le moindre effort, j'essaie de marcher à toutes les montées voir si ça passe niveau timing. Si ça passe c'est royal, faudrait courir tranquille sur le plat, marcher dès qu'il y a une légère pente (faut pas déconner non plus, faudrait pas que ce soit difficile). J'vous le donne en mille, on arrive à la fin en 54 minutes, ultra frais, on a marché à toutes les montées qu'on a vu et ça passe. J'irai même jusqu'à dire ça passe large. À partir de là, j'ai la réponse à ma question: oui, on terminera cette course je n'ai plus de doute. Maintenant il va falloir gérer la fatigue, gérer la cheville et le reste c'est que du plaisir.

Tour 2 - 7

J'enchaine mon 2ième tour après 5 minutes de pause, juste le temps de récupérer un petit truc à manger au ravitaillement, de boire un coup et c'est reparti. Changement d'ambiance dans mon "groupe", sachant que la plupart des coureurs ont la strat 1h chacun, je me retrouve avec de nouvelles personnes. Je tombe uniquement sur des coureurs qui vont vite. Alors je ne comprends pas trop la stratégie, la peur de ne pas arriver à temps d'après ce qu'on m'a dit, mais en tout cas ils vont tous beaucoup plus vite que moi, sauf une personne. Cette personne ça va être presque mon vrai binôme au final pendant cette course parce que on sera toujours les deux derniers dès le début des tours et je n'aurai finalement que peu l'occasion de parler à d'autres coureurs pendant les tours sachant qu'ils iront tout le temps plus vite que moi. Mais bon, pas peu fier de ma stratégie je ne change rien. J'en viens presque à me demander où est l'erreur vu que personne ne fait comme moi.

Bref, la routine s'installe tranquillement, les tours défilent on prend toujours 5 minutes à la fin des tours pour échanger sur notre état de forme avec Rémy, mais pas bien le temps de s'attarder plus que ça sachant qu'il a la même stratégie de la dernière place que moi. Pendant tous ces tours, je me pose la question du Burning lap. Je retourne toutes les possibilités dans ma tête, ma cheville ? Est- ce que je prends le risque ? Quel va être mon état si je donne tout au tour 8 ? Est-ce que c'est intelligent si on vise de terminer les 24h ? Puis le Burning lap c'est un peu un risque, uniquement le 1er remporte la mise, le 2ième lui repart avec de la fatigue accumulée et puis c'est tout. Alors j'hésite. Pendant mon tour 4 et surtout mon tour 6, je prends un peu la température. Je navigue entre les différents groupes de coureurs et j'entends les gens parler. Tel la fouine je tends l'oreille en quête d'informations qui m'aideraient à prendre ma décision. "Ouai, moi le Burning lap, pfff laisse tomber ça m'intéresse pas" pas ci. "Humm je sais pas si je vais le tenter, mais ma taille en bouteille de bière me tente bien..." par là. Difficile à dire quelles sont les réelles intentions des gens qui parlent sachant qu'au Burning lap ils sont en compétitions ? J'ai l'impression comme ça que ça ne chauffe pas tant de monde que ça. Au fur à mesure de mon enquête, j'en arrive à la conclusion suivante: c'est inutile. C'est un trop gros risque pour ma cheville, je ne suis pas tout seul dans cette aventure, si je me flingue, je flingue la course de Rémy. Je me dis tant pis, mieux vaut prévenir que guérir et puis si imaginons je suis ok niveau de la cheville pour le 24ième tour, et bien ce sera le moment de tout donner et ne pas avoir fait ce Burning lap du tour 8 m'aura permis de m'économiser. C'est décidé, je ne ferai pas le Burning lap.

Petit à petit la soirée s'installe, la luminosité diminue, je termine mon 6ième tour à 19h, pas encore besoin de la frontale, mais la prochaine pour Rémy c'est la bonne, changement d'ambiance pendant sont 7ième tour. En attendant qu'il termine son tour, je vais comme à mon habitude faire un petit tour à mon endroit favori: la ravitaillement ! L'arrivée de la nuit signifie l'arrivée des bon petits plats chauds, et notamment de la soupe. Grand fan de soupe, je n'hésite pas une seconde je m'en prends un plein verre qui me réchauffe, une bonne petite régalade. Je vous le dit d'avance: quelle erreur du coureur Français...

Tour 8 - Burning lap

Je me place dans le sas de départ 2 minutes avant le départ, tout le monde à la frontale c'est le 1er tour en pleine nuit. Cette fois ci, je ne me place pas tout derrière, mais plutôt tout devant. Loin de moi l'idée de participer à cette folie qu'est le Burning lap non, c'est juste de la... curiosité. J'ai envie de voir à quel point les gens vont se donner. J'en vois un qui se place bien devant, on l'appellera Gertrude pour garantir son anonymat. Moi comme à mon habitude, facilement impressionnable en société, j'analyse Gertrude: fit, lunettes de coureur teinte iridium professionnel, affaires impeccables, il ne m'en faut pas plus pour que je me dise: woaw, il est fort. Donc je le garde dans mon champs de vision, voir ce que ça donne. Il est 21h10 pétante (oui le groupe des duos on part toutes les heures à 10), le go est donné, les fauves sont lâchés, il fait nuit, le Burning lap vient de démarrer.

Cette fois ci, ça part fort. Gertrude que j'ai en visuel est effectivement chaud pour rafler les bières. Alors je tente de suivre. Je me rends compte que en 10 secondes qu'il est déjà bien devant, que moi je le suis et les autres sont un peu à la traîne. Et là ça me titille, j'hésite. J'hésite longuement pendant à peu près 4 secondes (le temps ralenti dans ces moments là ok ?) et je me dis et puis merde, rien à foutre. Je lâche une accélération, à la seconde 15 je prends la tête du Burning lap, et à partir de là, boum gros stress. Dans ma tête il se passe plein de trucs, j'avais pas prévu ça. Maintenant faut que j'assume. Je n'ai jamais été devant dans une course, j'ai toujours eu quelqu'un à suivre, je ne sais pas comment ça se gère. Je suis un peu en panique et là j'ai la soupe qui remonte. J'ai envie de gerber parce que je donne tout et je commence à avoir mal au bide. Je rote de la soupe aux poireaux / petits pois toutes les 15 secondes c'est horrible. J'entends les pas derrière moi. Je comprends, je sais pertinemment qu'on ne va pas me laisser filer comme ça. Imaginez être devant, entendre les pas derrière. En vrai c'est un stress de dingue, c'est une position que je n'aime pas du tout, je préfère de loin être le chasseur que le chassé. Alors je me dis que je dois me retourner, pour savoir si je gagne du terrain ou si j'en perds, mais si je me retourne trop souvent, ça fait le mec stressé et c'est un signe de faiblesse. Donc je tente des mini coups d'œil dans les virages pour jauger, mais en vrai je ne vois rien, il fait nuit avec les frontales tout ce que je vois c'est des halos lumineux. Alors au début du tour, je sais que le halo le plus proche de moi c'est le 2ième, mais quand on commence à rattraper les groups qui sont parti à 21h05 et 21h00, ça devient un bordel. Impossible de savoir qui se trouve derrière moi. Alors dans le doute, je fais comme si j'avais tout le temps quelqu'un au cul. Franchement à des moments j'hésite à abandonner à me dire, pas grave j'ai tout donné, c'était marrant mais là la soupe c'est too much. De l'autre je me dis mais bordel je ne peux pas abandonner maintenant ! C'est la 2ième façon de pensé qui va prendre le dessus, et je vais m'arracher jusqu'au bout. Très honnêtement jusqu'au bout j'ai l'impression qu'il y a quelqu'un à 30 centimètres de mes fesses. Je me souviens des montées sur les tas de graviers j'entends les bruits de pas dedans comme si la personne était prête à me passer devant. Je n'ose même plus me retourner je file juste le plus vite que je peux tête baissé en essayant de garder le cap. On a l'impression que c'est ma vie qui est en jeu là mais dans l'esprit je pense que c'était presque ça. Plus on se rapproche de l'arrivée, plus j'me dis mais bordel, je vais le faire. Et ce sentiment d'accomplissement ne va faire qu'augmenter au fur et à mesure des derniers kilomètres. Sur les 2 derniers je commence à réaliser que je vais y arriver. Je me retourne de temps en temps je ne vois personne. Je ne lâche rien pour autant, mais la libération du stress petit à petit me fait un bien fou, même si je rote encore de la soupe. Il est temps que j'arrive. J'arrive sur la dernière ligne droite, je lâche mon meilleur sprint et passe la ligne d'arrivée comme à mon habitude en sautant et en criant, une façon de relâcher la pression. J'arrive en 33min35s, je gagne le Burning lap, et je bat le record de l'épreuve duo de plus de 1 minute.

Ayant dit à Rémy et mon père que je ne faisais pas le Burning lap, j'arrive un peu plus de 20 minutes avant l'heure prévu, et à presque 23h. Donc ni Rémy, si mon père n'est là quand j'arrive, ni personne d'ailleurs parce que à cette heure là, la plupart des gens sont parti dormir. J'ai le droit à l'arrivée quand même au speaker qui me félicite, et à une petite phrase qui m'a amusé: "J'avoue qu'on avait pas parié sur toi, j'ai 2/3 personnes bien entrainé dans le groupe mais bon, félicitations". Je monte donc sur scène devant à la louche 0 personne, 0 photo prise, on me mesure en bouteilles de bière, sachez que je mesure approximativement 8 bouteilles de bière Rock'n'Trail IPA, ce qui sans être exceptionnel, n'est pas ridicule non plus. Pour illustrer un peu, vu que personne n'était là pour immortaliser ce moment, je vais mettre une photo du vainqueur du Burning lap Solo qui est arrivé un peu plus tard, et là il y avait du monde, comme par hasard ! Bon il faut juste imaginer que c'est moi à la place de lui sur la photo mais sinon, tout pareil.

Je récupère également la coupe de vainqueur de l'épreuve que j'avais déjà repéré avant de commencer parce que elles est trop classe, et pour être honnête seule la coupe m'intéressait, les bières elles sont encore dans mon frigo, toujours pas ouvertes...

C'est finalement quelques minutes plus tard après avoir prévenu Rémy et mon père qu'on a pu prendre une photo.

Elle est classe avouez le.

Tour 9 - 17, la nuit

Je prends l'heure pour me reposer après le Burning lap, j'ai même dit à Rémy à l'arrivé qu'éventuellement il devrait enchainer 2 tours étant un peu à bout. Mais finalement, je récupèrerai plutôt bien pendant cette heure et on continuera la même stratégie de 1h/1h.

Cette partie de la course nous fait vraiment rentrer presque dans une 2ième course. Rien n'est pareil, il y a beaucoup moins d'ambiance, de bruit, de monde. Tout est calme et la routine s'installe plus que jamais. Plus on avance dans la nuit, plus la fatigue s'installe, et le froid qui va avec. Et c'est en fait ce que je redoutais. Non pas la fatigue physique, mais l'envie de dormir. Courir une heure, ensuite s'arrêter une heure dans le calme c'est difficile. Plus on avance dans la nuit, plus l'heure de repos est finalement la partie difficile car j'ai envie de dormir, mais je n'ai pas envie de vraiment m'endormir parce que je sais que aller courir après un sommeil profond est une misère. J'opte donc pour la technique dite de l'endormis équilibriste. C'est simple, je me pose sur la chaise en essayant d'avoir mon cou en équilibre avec le reste de mon corps et tente de m'endormir. C'est difficile, mais j'y arrive.

L'endormis équilibriste.

Au final ce genre de repos ne sera qu'un maigre réconfort parce que la fatigue sera toujours là. Mais le pire c'est le froid. Il ne fait pas super froid, mais étant fatigué je me les gèle comme pas possible, je passe la majorité de mon temps devant les braséros quand je ne tente pas de dormir en équilibre. Problème avec ça, c'est que je me réchauffe, mais du coup dès que je quitte les flammes, j'ai encore plus froid. C'est con, mais je ferai ça à tous les tours jusqu'à la fin de la nuit.

Tour 18 - 22, enfin le soleil.

le tour 18 sera le 1er tour avec le début du soleil, très vite la fraicheur n'est donc plus un problème. Au contraire, on aura une journée ensoleillée et il fera vite (trop) chaud dans la carrière. Je fais ce premier tour relativement en forme, parce que le changement d'ambiance, passer à la "dernière phase" de cette course en 24h fait du bien.

J'attaque le tour 20, on s'approche de la fin et il est temps que ça s'arrête, j'aime bien courir mais là j'en ai un petit peu marre ! Je commence à penser à quoi faire pour le tour 24, mais ce tour va être une hécatombe pour moi. Une fatigue massive va s'abattre sur moi. Pas physique mais une réelle envie de dormir. Je fais mon tour la tête ailleurs avec l'envie de m'écrouler dans un lit. Pour la première fois je termine dernier de mon tour, mais avec le sentiment d'avoir donné mon maximum. Pour le tour 24 là, il me semble inenvisageable d'envisager quoi que ce soit. j'en discute rapidement avec Rémy à l'arrivée, je lui demande ce qu'il compte faire, si on fait le tour 24 ensemble histoire de faire le 1er et le dernier. La réponse est non, et à priori on va se contenter de juste finir. L'objectif était de le finir, à priori ça c'est bon. En bonus je ramène le Burning lap, donc c'est très bien.

Je profite cette fois de ma pause pendant que Rémy fait son 21ième tour pour aller vraiment dormir. Finit le coup de l'équilibriste, cette fois si je me fabrique un oreiller, je vais sur les matelas et c'est parti pour une sieste de 40min. Et ben c'est finalement un bien énorme que me fait cette sieste. Je me réveille avec la pêche. Rémy arrive, j'attaque mon avant dernier tour, le 22. Je commence à me dire que ça vaut peut être le coup de tenter un truc pour le dernier tour. Alors c'est reparti, je pars à la chasse aux infos. Je démarre un peu vite ce tour en essayant de coller aux basquettes des mecs fort tout devant. Je vois que ça bombarde pas mal, j'essaie de suivre mais sans me cramer, je reste loin derrière. Au fur et à mesure je finis par les rattraper tranquillement et leur demande si ça joue la gagne pour le tour 24. les 2 personnes à qui je demande m'expliquent que oui, ils vont jouer la gagne, mais que ce n'est pas eux qui vont courir. Là dans ma tête je me dis que c'est bizarre, ils sont super fort ils ont fait le tour 22 super rapidement et n'ont pas l'air d'avoir vraiment tout donné. Au final, je finis le tour 22 en 45 minutes.

Il n'y a qu'une seule stratégie possible si je veux faire un résultat, c'est d'essayer de gratter la 3ième place. D'après les infos que j'ai, 2 personnes vont partir et se sont préparées spécialement pour la gagne. Je ne pense pas pouvoir rivaliser, la seule solution c'est de les suivre le maximum de temps que je peux les 2 premiers, et ensuite me laisser distancer en espérant avoir eu un ascendant psychologique sur les autres pour qu'ils n'essaient pas de me rattraper (oui c'est lâche, j'assume).

Tour 24 - Dernier tour.

J'attends que Rémy finisse son tour et du coup sa course sous le soleil. Il est midi et il fait bien chaud. Je redoute ce tour, je me suis déjà vraiment donné pour le Burning lap du tour 8, et je n'ai pas envie de me mettre la pression et me mettre à bout encore une fois. Mais au fond de moi je sais très bien que je vais tenter un truc.

Je vois Rémy arriver avec sa team des derniers, ou plutôt la team de la stratégie la plus efficace. Les mêmes personnes avec qui j'ai couru également le 1er tour. Ils ne se sont à priori pas quitté de toute la course et ils arrivent tous en groupe en même temps tous content d'avoir finit leur course. Pas la même ambiance que moi où on n'a pas réussi à faire le même groupe des derniers, j'ai passé beaucoup plus de temps solo. Je suis content pour eux !

Rémy me rejoint, je prends pour la dernière fois le capteur que j'attache à ma cheville et rejoint la ligne de départ. J'essaie de voir qui sont les 2 mecs fort histoire de les suivre. Je ne vois personne en particulier, bon, tant pis on verra bien. Le départ est donnée, je pars à fond direct. Comme pour le Burning lap, je prends tout de suite la tête de la course et donc j'ai immédiatement la pression. Au bout d'un kilomètre, j'entends quelqu'un qui me colle au cul depuis le début. Mais uniquement une personne. Il finit par se mettre à mon niveau, c'est Mr Duchemin, de l'équipe Mr & Mme Duchemin. On fait les présentations tous les deux en étant à fond. En 10 secondes on devient les best bros de la course et à la suite d'une accolade on se dit qu'on le fait ensemble ce dernier tour. Oui c'est comme ça la course à pied, on passe d'illustres inconnus à BFF en 20 secondes y'a aucun problème. Et c'est donc parti, je pense qu'on fait les 3 premiers kilomètres à peu près en même temps. Ensuite son cardio en montée va faire la différence sur moi qui va être un peu en dessous. Il va petit à petit prendre du terrain. A plusieurs reprise il va se retourner pour m'encourager, mais je lui dit d'y aller pour la gagne, que cette fois-ci il est meilleur. Je me retrouve donc seul avec la pression qu'on me rattrape alors je continue malgré tout à tout donner. Un peu comme pendant le Burning lap, il y a ce dernier passage où on doit monter sur des tas de graviers, c'est la dernière petite difficulté de l'épreuve et arrivé ici, je sais que je peux assurer la 2ième place. Donc je profite encore de ce moment, mais je fonce, je ne m'arrête pas. Je débaroule dans la dernière descente plus vite que jamais, j'arrive à l'endroit où on commence à voir du monde pour encourager les coureurs, il reste 200 mètres. Dernière ligne droite, Rémy qui me rejoint, c'est l'heure du sprint. Je fonce le plus vite possible, les bras collés le long du corps histoire de dire, on est pas les Runbras pour rien, et passe la ligne d'arrivée. Fier, et content de finir sur une note si positive. J'ai mon rival du dernier tour Mr Duchemin qui est là et me félicite, c'est super cordial ça fait plaisir.

à l'arrivée, un peu fatigué, Mr Duchemin derrière.

On va du coup avoir droit à notre podium, personnellement c'est la première fois que je fais un podium, alors c'est pas l'UTMB certes, mais ça fait toujours plaisir ! Puis on est reparti avec plein de victuailles comme du cidre, du camembert, de la purée de brocolis... et j'en passe (oui, la course était en partenariat avec Intermarché). Egalement, des bons d'achat chez Asics (à Caen, pratique depuis Lyon :)) et un dossard pour le Ménestrail auquel je ne pourrais pas participer pour cause de SaintéLyon (et pour cause de c'est à l'autre bout de la France accessoirement), donc si quelqu'un lit ces lignes, c'est cadeau.

Mais on repart surtout avec une super expérience, de bons souvenirs. Et aussi, l'idée de me dire merde, à force d'entrainement, ça finit par être possible les podiums. Et avec toutes les blessures que je me prends à longueur de saisons, ça permet de contrebalancer le négatif et de se dire que quand ça ira mieux, je pourrais aller encore plus loin.

Comme d'habitude, merci aux organisateurs, qui ont mis l'ambiance avant la course, pendant la course et après la course. Littéralement ça fait plus de 24h à fond à s'égosiller, j'ai rarement vu ça. C'est une course que je recommande vraiment pour sortir un peu des courses "classiques", il faut être prêt à aller jusque dans la Manche à Muneville-Le-Bingard par contre.

Merci à mon père pour la logistique comme d'habitude qui a passé une nuit à dormir dans sa voiture qui était plus confortable qu'il ne l'imaginait finalement.

Prochaine péripétie: UT4M 100 Master (normalement, si il n'y a pas une tempête et si je ne me brise pas la cheville).